Cecilia Bartoli & Les Musiciens du Prince - Monaco
5 Nov.'24
- 19:00
Salle Henry Le Bœuf
Christoph Willibald Gluck (1714-1787)
Orfeo ed Euridice (version de 1769)
- Acte I
- Acte I
- Acte III
Durée : 1 h 30
Gluck et la réforme de l’opéra
Les premiers compositeurs d'opéra, comme Peri et Caccini, bien qu'étant eux-mêmes chanteurs, ne cherchaient pas à mettre l'accent sur la glorification de l'art vocal dans leur musique scénique. Ce qu’ils visaient n’était pas le bel canto mais bien le dramma in musica dans lequel la musique était subordonnée au texte mais où, en dehors du récitatif dramatique, l’expression des sentiments trouvait également sa place dans des ariosos et des arias qui reprenaient le rôle du chœur antique. Cet idéal vit naître, en 1607, le chef-d’œuvre de Monteverdi qu’est l’Orfeo. Ce n’est qu’au début du XVIIIe siècle que l’opéra connut une profonde transformation avec l’apparition du bel canto : les chanteurs et chanteuses devinrent alors le centre du théâtre musical. Le rôle du compositeur et du librettiste se réduisit à procurer au soliste le matériau lui permettant de mettre son talent en valeur. L’équilibre entre l’action et le spectacle, entre le récitatif et l’air, bascula vers un nouvel extrême. L’idéal des pionniers de l’opéra, membres de la Camerata florentine, était oublié ; le public n’allait plus au théâtre que pour entendre chanter de la manière la plus virtuose, la plus séduisante possible. Le castrat et la prima donna régnaient en maîtres sur la scène lyrique.
Puisque le livret était considéré comme secondaire, il n’était donc plus nécessaire de donner à chaque œuvre une structure propre. Un opera seria, qu’il fût composé à Londres, à Naples ou à Vienne, était toujours cette alternance de récitatifs et d’arias da capo structurés en trois actes, eux-mêmes divisés en une vingtaine de scènes dans lesquelles trois couples de chanteurs se partageaient la vedette. Vers la moitié du XVIIIe siècle, ce modèle, mis en place par le grand Metastasio, tombe progressivement en désuétude ; on en vient alors à espérer le retour à un genre qui rende justice au texte. C’est dans ce contexte que Christoph Willibald von Gluck (1714-1787) va réaliser la réforme de l’opera seria. Orfeo ed Euridice (1762) constitue un point de repère dans la production de Gluck ainsi que dans l’histoire de l’opéra : il s’agit en effet de la première œuvre dans laquelle le compositeur introduit les grands principes de sa réforme. L’idée centrale de Gluck est que la musique se trouve entièrement au service de la poésie et du drame. Les personnages s’expriment dans un style déclamatoire et non plus dans des arias où l’on cultive la virtuosité pour la virtuosité. Cet aspect déclamatoire de l’aria, combiné à l’emploi fréquent du recitativo accompagnato (récitatif avec accompagnement orchestral) a pour effet de réduire le contraste entre air et récitatif, l’action scénique se déroulant ainsi dans une plus grande continuité et avec une plus grande vérité dramatique.
Pour réaliser sa réforme, Gluck avait besoin de librettistes qui puissent lui fournir un matériau poétique adéquat. Il y eut tout d’abord le comte Giacomo Durazzo, puis surtout Raniero de’ Calzabigi. Très en vue à Vienne, il était, comme Gluck lui-même, un grand connaisseur de l’œuvre de Metastasio et un grand admirateur de la tragédie lyrique française de Lully et Rameau. En qualité de disciple des encyclopédistes et de Jean-Jacques Rousseau, Calzabigi prônait le réalisme et le naturel des situations au théâtre. Il voulait rompre avec la structure dramatique stéréotypée ‘à la Metastasio’ et estimait que la division stricte entre récitatifs narratifs et airs contemplatifs créait une barrière à la représentation de l’évolution constante des sentiments des personnages. Ce sont précisément ces sentiments, ces émotions qu’il désirait mettre en scène. Quant à Gluck lui-même, il fut loin de minimiser le rôle que joua Calzabigi dans l’élaboration d’un nouveau langage opératique : le compositeur pensait en effet qui était abusif de n’attribuer qu’à lui seul l’invention d’un nouvel opéra italien et soulignait le rôle crucial qu’avait joué son librettiste dans le développement de son art.
Orfeo ed Euridice
Dès le début du premier acte, les bergers et les nymphes se lamentent avec Orphée sur la tombe d’Eurydice. L’atmosphère funèbre envahit l’œuvre depuis ce chœur initial jusqu’à la dernière scène. Le chœur y occupe une place centrale, soit comme allié, soit comme adversaire d’Orphée. Gluck, qui savait discerner les points forts d’un livret et les exploiter pleinement, conçoit les scènes où Calzabigi met le chœur en présence d’Orphée comme un tout monumental structuré de manière symétrique. Cet emploi du chœur ainsi que la place accordée à la danse proviennent directement de la tradition française. Le troisième acte est assez différent des deux premiers. Gluck y représente, avec beaucoup de simplicité et d’humanité, la rencontre entre deux amoureux en composant un long récitatif accompagné qui culmine dans la célèbre aria Ché faro senza Euridice. Le fait qu’Orphée doive non seulement obéir à l’interdiction de regarder Eurydice mais aussi garder le silence, renforce l’efficacité dramatique de la pièce. Ce silence forcé, élément essentiel du mythe original, fut négligé par Ovide et Virgile et par tous les librettistes qui se basèrent sur leur récit. En sortant cette nouvelle épreuve de l’oubli, Calzabigi et Gluck construisirent une scène hautement dramatique : Orphée se retourne non parce qu’il succombe à l’envie de voir Eurydice, mais parce que celle-ci, incapable de comprendre son attitude, se désespère et s’écrie que, sans son amour, elle préfère retourner aux enfers.
En réalisant un enchaînement d’arias moins virtuoses et de récitatifs proches de l’arioso, les émotions sont exprimées en parfaite adéquation avec l’action, sans en ralentir le déroulement comme c’était le cas dans l’opera seria. Le raffinement de l’orchestration joue un rôle important sur le plan dramatique. Les cornets et les trombones apportent couleur et force au chœur, et nombreux sont les instruments auxquels Gluck attribue un rôle concertant : cors, hautbois, bassons, flûtes, harpe, ... Le compositeur n’a pas hésité à enrichir sa palette de sonorités en utilisant un ‘ancien’ instrument, le chalumeau, et une technique ‘ancienne’, l’écho. L’orchestre devient un acteur du drame.
La création de l’Orfeo eut lieu le 5 octobre 1762 et remporta très vite un grand succès, comme en témoignent les 19 représentations qui eurent lieu à Vienne. D’autres représentations suivirent bientôt en Europe et, en 1774, Gluck et Calzabigi réalisèrent une adaptation en français pour la scène parisienne. L’Orfeo contribua grandement à faire de Gluck une célébrité internationale. A Paris, Rousseau, pourtant peu converti à la cause de Gluck, rendit à l’Orfeo le plus bel hommage que l’on puisse faire à une œuvre d’art : « Passer deux heures dans la joie d’un plaisir si grand me persuade que la vie vaut la peine d’être vécue. »
D’après Pieter Andriessen
Gianluco Capuano
direction musicale
Gianluca Capuano a étudié l’orgue, la composition, la direction, la musique
ancienne et la philosophie à Milan, sa ville natale. Depuis 2019, il est à la tête
de l’ensemble Les Musiciens du Prince – Monaco. Il s’est produit dans toute l’Europe et aux États-Unis, en Russie et au Japon en tant que chef, organiste et continuiste. En 2023-2024, il a dirigé Orfeo ed Euridice au Palau de les Arts Reina Sofía à Valence, Giulio Cesare et Ein deutsches Requiem de Brahms à Monte Carlo et Norma au Bayerische Staatsoper.
Cecilia Bartoli
Orfeo (mezzo-soprano)
La mezzo-soprano italienne Cecilia Bartoli est l’une des plus grandes artistes
de la musique classique, avec une carrière exceptionnelle de plus de 30 ans et qui ne cesse de s’étoffer. Son travail est né de sa passion pour la redécouverte de partitions oubliées et de son profond intérêt pour les interprétations historiquement informées. Ses projets ambitieux et plébiscités par un vaste public englobent diverses formes artistiques et lui ont valu une reconnaissance
internationale. Son parcours remarquable, véritable modèle pour les générations
futures, fait de Cecilia Bartoli une personnalité qui marquera l’histoire de la musique.
Melissa Pétit
Euridice & Amore (soprano)
La soprano française Mélissa Petit a étudié le piano et le chant à Saint-Raphaël et à Nice. En 2015, elle a fait ses débuts à l’Opéra national de Paris dans le rôle de Giannetta (dans L’elisir d’amore de Donizetti). Les succès les plus récents de Petit comprennent ses débuts acclamés dans le rôle-titre du La Petite Renarde rusée de Janáček, ses débuts au Staatsoper Berlin dans le rôle d’Ilia dans
Idomeneo et ses débuts dans le rôle de Sophie dans Der Rosenkavalier de Strauss au Grand Théâtre de Genève. Elle a également parcouru les salles de concert les plus prestigieuses d’Europe dans le rôle de Servilia dans La Clemenza di Tito de Mozart, aux côtés de Cecilia Bartoli.
Il Canto di Orfeo
Il Canto di Orfeo a été fondé en 2005 par Gianluca Capuano. L’ensemble vocal et instrumental se concentre sur la musique baroque, en particulier sur l'oeuvre de Giacomo Carissimi et ses élèves. L’ensemble fait également des incursions musicales dans des oeuvres de la Renaissance tardive et contemporaines. Il Canto di Orfeo a enregistré des arias de Galuppi, entre autres, et a consacré
un album aux madrigaux de Mantoue et de Ferrare du XVIe siècle. L’ensemble
est très apprécié pour ses interprétations de la musique baroque italienne vocale et se produit régulièrement dans les principaux festivals de musique ancienne en
Italie, en France, en Autriche, en Suisse et en Allemagne.
Les Musiciens du Prince - Monaco
L’orchestre Les Musiciens du Prince – Monaco a été créé au printemps 2016 sur
une idée de Cecilia Bartoli en collaboration avec Jean-Louis Grinda, alors directeur de l’Opéra de Monte-Carlo. Cet orchestre renouant avec la tradition des cours européennes des XVIIe et XVIIIe siècles réunit les meilleurs musiciens internationaux sur instruments d’époque. Sa vision se porte sur les oeuvres rares de la période baroque mais aussi sur Mozart et Rossini. Avec Cecilia Bartoli, il parcourt les plus grandes salles d’Europe, salué par le public et une presse internationale unanime. Gianluca Capuano en est le chef principal depuis mars 2019.
Il Canto di Orfeo
soprano
Maria Dalia Albertini
Laura Andreini
Caterina Iora
Arianna Miceli
Naoka Ohbayashi
alto
Giulia Beatini
Paola Cialdella
Jacopo Facchini
Annalisa Mazzoni
Elisabetta Vuocolo
ténor
Alessandro Baudino
Paolo Borgonovo
Maurizio Dalena
Stefano Gambarino
Peter Gus
basse
Cesare Costamagna
Lorenzo Martinuzzi
Luca Scaccabarozzi
Yannis Vassilakis
Pier Marco Viñas
Les Musiciens du Prince - Monaco
premier violon
Thibault Noally
Agnes Kertesz
Andrea Vassalle
Roberto Rutkauskas
Muriel Quistad
Anna Urpina
Anaïs Soucaille
Elena Telo
second violon
Nicolas Mazzoleni
Francesco Colletti
Gian Andrea Guerra
Laura Cavazzuti
Reyes Gallardo
Svetlana Fomina
alto
Diego Mecca
Massimo Percivaldi
Elisa Imbalzano
Erica Alberti
violoncelle
Antonio Papetti
Nicola Brovelli
Anna Camporini
Rolando Moro
contrebasse
Roberto Fernandez de
Larrinoa
Clotilde Guyon
hautbois
Pier Luigi Fabretti
Guido Campana
flûte
Pablo Sosa
Rebekka Brunner
basson
Benny Aghassi
cor
Ulrich Hübner
Claude Padoan
trombone
Seth Quistad
Cas Gevers
Gunter Carlier
harpe
Marta Graziolino
percussion
Saverio Rufo
piano-forte
Maria Shabashova
3 Dec.'24 - 20:00
Alexander Chance & Toby Carr
Love and Loss
5 Dec.'24 - 20:00
Orchestre des Champs-Elysées & Herreweghe
Beethoven 9
10 Dec.'24 - 20:00
Grigory Sokolov
12 Dec.'24 - 20:00
Akademie für Alte Musik Berlin
Bach: Magnificat
10 Jan.'25 - 20:00
Jordi Savall & Hespèrion XXI
Un Mar de Músicas
24 Feb.'25 - 20:00
Graindelavoix & Jan Michiels
Epitaphs of Afterwardness
14 Maa.'25 - 20:00
Vox Luminis & Lionel Meunier
Ein Deutsches Barockrequiem
9 Apr.'25 - 20:00
Le Poème Harmonique
Purcell: Dido and Aeneas
15 Juni'25 - 19:00
Los Angeles Master Chorale & Peter Sellars
Music to Accompany a Departure
Bozar Maecenas
Prince et Princesse de Chimay · Monsieur et Madame Betrand Ferrier · Barones Michèle Galle-Sioen · Monsieur et Madame Laurent Legein · Madame Heike Müller · Monsieur et Madame Dominique Peninon · Monsieur et Madame Antoine Winckler · Chevalier Godefroid de Wouters d’Oplinter
Bozar Honorary Patrons
Comte Etienne Davignon · Madame Léo Goldschmidt
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Bozar Circle
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Bozar Young Circle
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