Caroline Shaw & Kamus Quartet
30 Sept.'24
- 20:00
Les Brigittines
Caroline Shaw (°1982)
The Evergreen - I. Moss
Josquin Desprez (c.1450-1521)
Nymphes des bois (1497)
Caroline Shaw
Cant voi l’aube
The Evergreen - II. Stem
Will there be any Stars in my Crown
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Strijkkwartet nr. 6, op. 18/6 - IV. La Malinconia: Adagio - Allegretto quasi allegro (1800)
Caroline Shaw
Blueprint
The Evergreen - III. Water
And So
The Evergreen - IV. Root
Other Song
Made in Greenville
Greenville est loin d'être la plus grande ville de Caroline du Nord (États-Unis), et encore moins un nid de créativité, mais Caroline Shaw (née en 1982) y a néanmoins trouvé sa voie créative dès l'enfance. Sa mère, professeur de violon et chanteuse, a joué un rôle majeur, plaçant tôt les doigts de sa fille sur le manche d'un violon. En chantant dans des chorales locales, Shaw tombe ensuite amoureuse de la musique polyphonique, avec Josquin Desprez en guise de figure de proue. « Il n'y a toujours rien de tel que de chanter avec d'autres personnes. Lorsque j'écris de la musique, j’essaie de me connecter à ce sentiment. » Ses rencontres avec la musique ancienne deviennent de puissants souvenirs. Ainsi, dans Cant voi l'aube (30.9 avec le Kamus Quartet), elle met en musique un texte attribué au trouvère du XIIe siècle Gace Brulé. Il s'agit d'une aubade traditionnelle ou chanson du matin avec une touche de modernité. Shaw admet d’ailleurs qu’elle aurait presque pu être intitulée Walk of Shame.
C’est vers l'âge de dix ans que Shaw compose ses premières petites œuvres, imitant la musique de chambre de Brahms et Mozart. Trente ans plus tard, ses quatuors à cordes débordent d'originalité tout en étant parfois aussi familiers que ceux des grands romantiques. Dans Blueprint (30.9 avec le Kamus Quartet), elle dissèque le plan harmonique du Sixième Quatuor à cordes de Beethoven. Qu'elle utilise Beethoven comme plan ou un texte du XIIe siècle comme page blanche, Shaw part toujours à la recherche de la force poignante des harmonies. Depuis The Evergreen en 2020 (30.9 avec le Kamus Quartet), elle laisse un accord passer à un autre à un rythme délibérément plus lent que dans ses œuvres précédentes. Cette approche ouvre un nouveau chapitre dans la carrière de la compositrice, que les musicologues du futur décriront peut-être comme son passage d'une phase orange à une phase verte, en clin d'œil à l'album Orange et à sa composition Thousandth Orange. Comme si elle jouait avec des cubes, elle cherche une note commune dans une série d'accords, qui est parfois la fondamentale (tonalité), parfois un ornement (septième) ou un contraste (dissonance). Tout au long des quatre mouvements de l'œuvre cinématographique The Evergreen, des séquences d'accords accompagnent Shaw au fil de ses promenades. « Si je devais noter en musique ma promenade dans les bois, que voudrais-je entendre ? Quelle en serait la bande sonore ? » Le premier mouvement, Moss, démarre progressivement avec des notes fragiles qui gagnent en force pour produire une consonance. Le quatuor prend forme. Le sentier forestier apparaît. Les glissandi lents et irrésistibles de Stem se fondent en un coup de tonnerre, après quoi les gouttes de Water tombent du ciel avec des pizzicati aléatoires. Root est un exemple typique de la façon dont Shaw étire les triades en accords plus complexes, puis les réduit à leur base, le noyau sonore.
Le passé n'est jamais bien loin. C’est après avoir entendu le Quatuor à cordes Op. 77 n° 2 de Haydn que Shaw a composé Entr'acte (8.11 avec le Belgian National Orchestra). Cette œuvre de 2011 suit la structure classique d'un menuet et d'un trio tout en la faisant évoluer. « J'aime la façon dont certaines musiques, comme les menuets de l'opus 77, vous emmènent soudain de l'autre côté du miroir d'Alice, dans une sorte de transition absurde, subtile et en Technicolor. Le Belgian National Orchestra interprète la version pour orchestre à cordes d'Entr'acte.
Shaw trouve sa voix dans Roomful of Teeth
Pendant ses études de violon à l'université de Yale, Shaw ne cesse de chercher une approche sonore idiosyncratique. Et même au sens propre : une manière d’utiliser sa voix d'alto dans la musique ancienne et moderne. En 2009, elle auditionne donc pour Roomful of Teeth, un tout nouvel ensemble à huit voix qui souhaite aller au-delà de la tradition européenne du chant classique en ouvrant d'autres possibilités vocales. Shaw est admise et s'émerveille de l'ouverture d'esprit de ses collègues. Ils se forment auprès de chanteurs de gorge, de yodleurs, de stars de Broadway, de chanteurs folkloriques géorgiens et sardes et de leaders de death metal, entre autres. De plus, en ne passant des commandes qu'à des compositeurs contemporains, ils se constituent un répertoire unique. Shaw saisit sa chance et, au cours de trois étés entre 2009 et 2011, couche sur papier les quatre mouvements de la Partita for 8 Voices.
Partita for 8 Voices
Chants, chuchotements, murmures, soupirs et voix parlée s’entrechoquent dans la Partita for 8 Voices (21.11 avec Roomful of Teeth). Les trois premiers mouvements portent le nom d'une danse baroque (allemande, sarabande et courante) tandis que le dernier est baptisé d’après une forme de variation baroque, la passacaille. Shaw emprunte non seulement à ces danses leurs titres mais aussi certaines caractéristiques, en guise de clin d'œil aux suites de danses de Bach. Comme Bach, Shaw ouvre sa suite avec l'Allemande en 4/4. Le motif court-court-long typique de cette danse se traduit au niveau textuel par un ping-pong entre les chanteurs. La musique purement vocale évolue vers une conversation cacophonique, avant d'être interrompue par un simple accord, comme si l'on pouvait faire cesser le brouhaha de Times Square d’un claquement de doigts. Dans les suites baroques, une allemande est généralement suivie d'une courante, mais Shaw opte pour une Sarabande à la mesure typique de 3/4 afin d’obtenir un tampon doux précédant l'intense Courante. Le dialogue intime et sans paroles entre deux ensembles à quatre voix s’aventure ensuite dans une section B sans mesure avant de se terminer sur un la aigu fortissimo et des techniques géorgiennes de chant ventral. Comme dans la musique baroque, Shaw met l'accent sur le deuxième temps de chaque mesure. La Courante est introduite par des soupirs et des voix gutturales inspirées de la tradition inuite dans les parties ténor et basse. Une version fredonnée à voix douce de l'hymne The Shining Shore n'étouffe que temporairement les voix masculines. La Passacaglia met une fois de plus en évidence la polyvalence de Roomful of Teeth : la même séquence d'accords est chantée trois fois, trois fois dans un style vocal différent. Les voix supérieures se chargent de la mélodie, tandis que les voix graves assurent l’harmonie. Un texte de Sol LeWitt résonne ensuite dans un brouhaha de voix parlées, se transforme avec un grand gémissement en une plainte festive, puis disparaît dans un silence final avec les vibrations métalliques du chant guttural.
Déjà dans l’Allemande Shaw présente les sources textuelles et les techniques vocales qui seront examinées plus tard. Dans la Partita, elle combine son propre texte avec des instructions de danse (« to the side »), des poèmes de T.S. Eliot (« the detail of the pattern is movement ») et des instructions tirées de l'œuvre conceptuelle Wall Drawing 305 de Sol LeWitt (« twelve lines from the midpoint of each of the sides »). Elle aborde la musique ancienne (la suite de danses) en s'inspirant de son propre univers et de son amour de la musique classique, plutôt qu'avec le désir rebelle de la déconstruire. C'est peut-être grâce à cette attitude – et, bien sûr, à sa musique extraordinaire – que Shaw a remporté le Prix Pulitzer de la musique en 2013. À l'âge de 30 ans, elle était la plus jeune compositrice de tous les temps et seulement la cinquième femme à remporter ce prix. Alors qu’elle avait soumis sa candidature pour attirer l'attention sur Roomful of Teeth, qui avait du mal à obtenir des engagements de concert, elle a ainsi lancé sa propre carrière de compositrice. À l'époque, cependant, elle se concentrait sur le violon, était inconnue du grand public et n'avait pas encore obtenu de doctorat d'une université renommée. Ces éléments n'ont cependant pas refroidi le jury qui a clarifié son choix en déclarant : « Shaw change de vitesse si rapidement et si facilement, et chacun de ces virages est inattendu et plein de joie. Cela se passe avec tant de conviction et de cohérence que l'on ne doute jamais de son sens de l'architecture et de sa prévoyance ».
Percussions sur pots de fleurs, Schubert et steeldrums
Pourtant, même avant son Prix Pulitzer, Shaw écrivait des compositions pour d'autres ensembles. Le quatuor de percussions Sõ Percussion peut se considérer comme l'un de ses premiers « clients » grâce à Taxidermy (2012), qui recourt même à l’utilisation de pots de fleurs. « Il y a quelque chose de spécial chez Sõ Percussion, dans leur attitude et leur approche idiosyncratique et soigneuse. Et le fait qu’ils soient prêts à jouer sur de simples pots de fleurs ».
À Bozar (le 26 novembre), ils présenteront leur dernier album, Rectangles and Circumstance, ainsi qu'une sélection de leur album Let the Soil Play Its Simple Part, récompensé par un Grammy Award. Dans le processus d'écriture, les musiciens se partagent les responsabilités : Shaw choisit ou écrit les paroles, le quatuor fait de même. Shaw fournit les accords ou la mélodie, le quatuor la partie percussion, ou vice versa. Vous l'aurez compris, Rectangles penche plus vers la musique pop que vers la musique classique, plus vers Laura Marling que vers Monteverdi. L'attrait des dix chansons réside dans leurs multiples couches et leur caractère inattendu. Votre attention se pose tantôt sur la (les) voix familière(s) de Shaw, tantôt sur des synthés de basse ou des échantillons instrumentaux. To Music est une interprétation, ou plutôt une reprise, de la mélodie An die Musik de Schubert, avec steeldrum ! Terminer par un hommage audacieux à un maître classique qui avait lui-même rendu hommage à la musique en écrivant cette œuvre ? La boucle est bouclée.
Une bibliothèque et une crucifixion
Caroline Shaw fait une troisième et dernière halte à Bozar cette saison aux côtés de Gabriel Kahane, un auteur-compositeur américain ayant lui aussi une prédilection pour la frontière entre le classique et la pop (le 12 mars). Leur amitié musicale a engendré le cycle de chansons Hexagons, inspiré par La Bibliothèque de Babel de Jorge Luis Borges, l'énigmatique histoire de 1939. Dans cette bibliothèque infinie, on peut trouver n'importe quel livre. Elle contient toutes les connaissances du monde, disposées dans des chambres hexagonales. Pourtant, les personnages ne deviennent pas beaucoup plus sages et se heurtent aux limites de leur compréhension humaine. Shaw et Kahane vous invitent à réfléchir aux joies, aux peines, à l'émerveillement et à la perplexité que suscite une vie sursaturée d'informations.
Une autre œuvre de Shaw qui sera entendue au Bozar cette saison est To The Hands (le 29 mai). Le Vlaams Radiokoor et Il Gardellino juxtaposent avec pertinence cette œuvre pour cordes et voix à Membra Jesu Nostri de Buxtehude, qui chante les parties du corps du Christ cloué sur la croix. En 2016, le chœur de chambre américain The Crossing a invité sept compositeurs à fournir une contrepartie contemporaine aux cantates de ce cycle poignant de Buxtehude. Shaw a signé six courts chorals et s'est plongée dans la douleur d’autrui. To the Hands prend naissance dans l'univers sonore du 17e siècle de Buxtehude. Celui-ci est élargi, coloré et décomposé au fur et à mesure que l'idée centrale de la pièce se précise : la souffrance de ceux qui appellent à l'aide dans le monde entier, ainsi que notre rôle et notre responsabilité dans cette crise mondiale et locale », explique-t-elle.
Guillaume De Grieve (traduction: Judith Hoorens)
Caroline Shaw
zang
Caroline Shaw (née en 1982) est une musicienne qui endosse de multiples rôles, passant d'un genre à l'autre et d'un moyen d’expression à l'autre, essayant d'imaginer un monde sonore qui n'a jamais été entendu auparavant mais qui a toujours existé. Elle a reçu le Prix Pulitzer pour sa musique en 2013, plusieurs Grammy Awards, un doctorat honorifique de Yale et une bourse Thomas J. Watson. Elle a collaboré avec plusieurs artistes, dont Rosalía, Renée Fleming et Yo Yo Ma, et a fourni la musique de films et de séries télévisées tels que Fleishman is in Trouble, Bombshell, Yellowjackets, Maid, Dark et Homecoming de Beyonce. Sa couleur préférée est le jaune et son parfum favori le romarin.
Kamus Quartet
Le Kamus Quartet est un ensemble scandinave de premier plan, connu pour son répertoire polyvalent, son ouverture d'esprit et sa maîtrise des différents styles d'interprétation, du classique ancien aux dernières tendances contemporaines. Ce quatuor finlandais existe depuis plus de vingt ans et a effectué des tournées au Royaume-Uni, en Europe et au Mexique. Le Kamus Quartet cherche de nouveaux moyens de faire découvrir la musique de chambre au grand public, tant dans les zones urbaines que dans les campagnes finlandaises. Il est également responsable artistique du Meidän Festvaali.
Cant voi l’aube - Caroline Shaw
Cant voi l’aube dou jor venir,
Nulle rien ne doi tant haïr,
K’elle fait de moi departir
Mon amin, cui j’ain per amors.
Or ne hais riens tant com le jour,
Amins, ke me depairt de vos.
Je ne vos puis de jor veoir,
Car trop redout l’apercevoir,
Et se vos di trestout por voir
K’en agait sont li enuious.
Or ne hais riens tant come le jour,
Amins, ke me depairt de vos.
Quant je me gix dedens mon lit
Et je resgairde encoste mi,
Je n’i truis poent de mon amin,
Se m’en plaing a fins amerous.
Biaus dous amis, vos en ireis;
A Deu soit vos cors comandeis.
Por Deu vos pri, ne m’oblieis!
Je n’ain nulle rien tant com vos.
Or ne hais riens tant come le jour,
Amins, ke me depairt de vos
Will there be any Stars in my Crown - Caroline Shaw
I am thinking today of that beautiful land
I shall reach when the sun goeth down
When through wonderful grace by my Saviour I stand
Will there be any stars in my crown.
Will there be any stars, any stars in my crown
When at evening the sun goeth down
When I wake with the blest in those mansions of rest
Will there be any stars in my crown.
In the strength of the Lord let me labor and pray
Let me watch as a winner of souls
That bright stars may be mine in the glorious day
Should there be any stars in my crown
Will there be any stars, any stars in my crown
When at evening the sun goeth down
When I wake with the blest in those mansions of rest
Will there be any stars in my crown.
Oh, what joy it will be when his face I behold
Living gems at his feet to lay down
It would sweeten my bliss in the city of gold
Should there be any stars in my crown.
Will there be any stars, any stars in my crown
When at evening the sun goeth down
When I wake with the blest in those mansions of rest
Will there be any stars in my crown...
And So - Caroline Shaw
Would a song by any other name
Sound as sweet and true?
Would all the reds be just the same
Or violets as blue?
If you were gone
Would words still flow
And would they rhyme with you?
If you were gone
Would I still know
How to love, and how to grow
And how the vowel threads through?
And so, you say, the saying goes
A rose is a rose is a rose is a rose
Is a rose is a rose is a tired rhyme
But in the verse there's always time
Would scansion cease to mark the beats if I went away?
Would a syllable interrupt the feet of tetrametric iambs when I am gone?
Listen, and I will sing a tune of love and life, and of the ocean's prose
And the poetry of a red, red rose that's nearly sprung in June
And so, you say, the saying goes
A rose is a rose is a rose is a rose
Is a rose is a rose is how I'm
Keeping track of time
When all the seas rise high, my dear
And rocks melt with the sun
Will the memory of us
Still rhyme with anyone?
Will we still tune our violins?
Will we still sing of roses?
Will we exist at all, my love
Or will we fade to stanzas of our dust
That, I suppose, is all we were and all we'll be?
And so, the saying, so it goes
Depends a lot on if a rose
Is a rose is a rose is a rose is a rose
Is a rose is a rose is a thing sublime
And so we stay on borrowed time
Nymphes des bois - Josquin Desprez
Nimphes des bois, deesses des fontaines
Chantres expers de toutes nations
Changés vos voix tant cleres et haultaines
En cris tranchans et lamentations
Car d'Atropos les molestations
Vostr' Ockeghem par sa rigueur attrappe
Vray tresoir de musicque et chief d'oeuvre
Qui de trépas désormais plus n'eschappe
Dont grant domaige est que la terre coeuvre.
Accoutrez vous d'habits de doeul,
Josquin, Brumel, Pierchon, Compere,
Et plourez grosses larmes d'œil
Perdu avez vostre bon pere,
Requiescat in pace.
« Tout m’inspire, je ne manque jamais d’idées. »
polyvalence de Caroline Shaw est mise à l'honneur à Bozar avec une anthologie de son répertoire, des quatuors à cordes à la musique vocale en passant par des chansons avec Gabriel Kahane. Rencontre avec une Américaine touche-à-tout !
Bon courage à qui tentera d’enfermer Caroline Shaw dans une catégorie. La compositrice américaine mêle pop, jazz et classique dans un langage musical unique. Sa polyvalence est d’ailleurs largement appréciée, comme en témoignent ses collaborations avec des stars classiques comme Anne Sofie von Otter et des artistes pop comme Rosalía.
Vous êtes active en tant que compositrice, violoniste et chanteuse. Ces univers semblent se confondre en permanence.
Caroline Shaw : « J'ai commencé le violon très jeune et, à l'âge de six ans, je composais déjà des chansons dans ma tête. À onze ans, j'ai reçu un cahier de musique dans lequel j'ai commencé à écrire toutes mes idées minutieusement. Pourtant, je l'ai longtemps caché, même à mes amis avec qui je jouais de la musique. Je ne connaissais pas de compositrice et je pensais qu'il était impossible de combiner l’interprétation et la composition. Aujourd'hui, bien sûr, je sais que j’avais tort et c'est probablement la raison pour laquelle toutes ces pratiques musicales sont fortement imbriquées en moi : je ne les vois jamais séparément. »
Vous chantez à Bozar dans pas moins de trois projets. Cela représente un certain investissement, n'est-ce pas ?
Shaw : « J'aime être sur scène avec ma propre musique. C’est un contexte dans lequel je peux interagir directement avec les musiciens et apprendre de leurs idées. On peut donc dire que je suis très impliquée, car je suis tout sauf une spectatrice. En outre, je trouve cela vraiment excitant d'introduire des genres plus populaires dans le monde classique. »
La manière de composer diffère-t-elle pour vous ? Je peux imaginer que l’approche n’est pas du tout la même selon qu’il s’agit d'une œuvre chorale, d’un quatuor à cordes, d’une collaboration avec un quatuor de percussions comme Sō Percussion ou avec le singer-songwriter Gabriel Kahane.
Shaw : « C'est vrai. La plupart du temps, je suis seule à mon bureau lorsque j'écris des œuvres pour des ensembles, mais une collaboration avec Sō Percussion exige beaucoup de dialogue avec les musiciens. Sur notre nouvel album Rectangles and Circumstance, il n’y a pas une seule pièce que j'aie composée entièrement seule. Nous avons tout écrit ensemble. Je reste la tête pensante principale, c’est sûr, mais les mélodies, les rythmes et les harmonies proviennent de tous les musiciens qui ont collaboré à l'album. »
Une collaboration avec le phénomène espagnol de la pop Rosalía se déroule-t-elle de la même manière ?
Shaw : « Rosalía possède une personnalité fantastique. Elle ne se considère pas comme une compositrice, mais pour moi, elle en est une. De haut niveau, d’ailleurs. Lorsque nous travaillons ensemble, c’est elle qui décide des mélodies et des structures, et je me charge ensuite d’y intégrer les extraits choraux. C'est une collaboration équilibrée, d’égale à égale. »
Où puisez-vous le plus d'inspiration pour composer ?
Shaw : « Je dois dire que tout m’inspire, donc je ne manque jamais d’idées. (rires) Pour mon quatuor à cordes The Evergreen, par exemple, je me suis inspirée d’un arbre dans une forêt canadienne. En regardant l'arbre, différentes idées mélodiques et sons me sont venus à l'esprit. La musique classique est également une grande source d'inspiration. J'ai une playlist particulièrement longue, composée essentiellement de musique ancienne. En ce moment, je suis à nouveau obsédée par Le Clavier bien tempéré de Jean-Sébastien Bach. Le moindre changement harmonique dans l'une des miniatures peut déjà former l'élément de base d'une nouvelle composition.
Avez-vous un morceau de musique classique préféré ?
Shaw : « Pour être honnête, cela change constamment. L'année dernière, c’était sans doute An die Musik de Schubert. Le dernier morceau de Rectangles and Circumstance est d’ailleurs un arrangement de cette pièce. Les progressions d'accords de Schubert sont si particulières, si magiques, on dirait qu’elles contiennent un monde d'émotions. Longtemps, je n’ai juré que par La Flûte enchantée de Mozart, mais aujourd'hui, je n’arrive même plus à l'écouter. (rires) Elle a trop tourné en boucle. »
Vous écrivez beaucoup pour la voix et les cordes. Est-ce que ce sont les instruments qui vous tiennent le plus à cœur ?
Shaw : « Je me sens très proche des instruments à cordes et j'aime donc beaucoup écrire pour quatuor. C’est une formation pour laquelle il existe un répertoire incroyable. Cela m’enrichit beaucoup lorsque j’écris pour un ensemble capable d’une grande écoute mutuelle. L’écriture orchestrale offre bien sûr plus de possibilités en termes de combinaisons d'instruments et de timbres, mais je trouve parfois que le processus de construction, où chaque élément doit être parfaitement adapté à la structure, y est moins sincère. Selon moi, l'instrument le plus personnel est peut-être la voix, parce qu'elle me permet de m'exprimer à l'infini.
Quels sont les projets sur lesquels vous travaillez actuellement ?
Shaw : « Je suis impliquée dans beaucoup trop de projets ! Parfois, j'ai déjà hâte d'être à la retraite. L'un de mes plus grands défis pour les années à venir est l’écriture d’un opéra pour le Deutsche Oper à Berlin, alors que j'avais pourtant dit que je ne ferais plus d'opéra. J'ai également plusieurs commandes de composition et je continue à travailler sur notre groupe pop Ringdown avec ma partenaire Danni Lee. Mon plus grand rêve serait de réaliser un autre projet avec Rosalía. Et si, pour une fois, on met la musique de côté, j'aimerais consacrer plus de temps aux fleurs de mon jardin. »
C’est la première fois que vous vous produirez à Bruxelles. Connaissez-vous un peu la ville ?
Shaw : « Lorsque j'avais 22 ans, j'ai passé quelques mois à Bruxelles et je suis tombée amoureuse de la ville. Je suis venue plusieurs fois à Bozar à l'époque, bien sûr, c'est vraiment un endroit spécial. J'ai hâte que ma musique résonne dans ce bâtiment emblématique. »
Maarten Sterckx
Caroline Shaw est sans conteste l’une des compositrices les plus influentes du classique contemporain, fusionnant le style baroque, la pop et la musique moderniste en un tout idiosyncrasique. Cette saison, Bozar lui consacre un portrait à travers ses quatuors à cordes, son travail vocal et percussif ainsi que son amour de la musique ancienne. À trois reprises, elle sera présente à Bruxelles pour accompagner le Kamus Quartet, Sõ Percussion et Gabriel Kahane. Roomful of Teeth, le Belgian National Orchestra, Il Gardellino et le Vlaams Radiokoor interprètent également ses œuvres. t.
Belgian National Orchestra, Halls & Ferrández
8 Nov.'24 - 20:00 – Henry Le Boeuf Hall, Bozar
Roomful of Teeth
21 Nov.'24 - 20:00 – Henry Le Boeuf Hall, Bozar
Meet the Artist: Caroline Shaw
25 Nov.'24 - 19:30 - Terarken, Bozar
Caroline Shaw & Sõ Percussion
26 Nov.'24 - 20:00 - Henry Le Boeuf Hall, Bozar
Caroline Shaw & Gabriel Kahane
12 Mar.'25 - 20:30 – Terarken, Bozar
Il Gardellino & Vlaams Radiokoor
29 Mai'25 - 20:00 - Church of St. James on Coudenberg
Bozar Maecenas
Prince et Princesse de Chimay • Barones Michèle Galle-Sioen • Monsieur et Madame Laurent Legein • Madame Heike Müller • Monsieur et Madame Dominique Peninon • Monsieur et Madame Antoine Winckler • Chevalier Godefroid de Wouters d'Oplinter
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Bozar Patrons
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