‘UNE VILLE MULTILINGUE DANS UNE CAMISOLE BILINGUE’

Bien que la liberté linguistique soit garantie par la Constitution, la langue a toujours été un sujet controversé en Belgique. Le modèle politique actuel est basé sur l’apaisement des conflits entre les deux principales communautés linguistiques. Ce modèle est le résultat d’un processus quasi continu de réforme de l’État s’appuyant sur le consociationalisme : un système de prévention des conflits, qui part de l’utilisation de langues officielles comme principal clivage politique. Ce schéma a entraîné une organisation complexe composée d’institutions publiques et semi-publiques.
Le modèle d’apaisement est basé sur la situation politique d’avant 1960. Depuis, les conditions ont changé radicalement. Bruxelles est devenue une ville d’immigration. Aujourd’hui, la moitié de la population est issue de la migration. Parmi les plus jeunes, les familles monolingues traditionnelles parlant l’une des langues officielles ne représentent plus qu’un tiers de la population. Les changements démographiques ont évidemment un impact sur les pratiques linguistiques. Dans tous les domaines de l’utilisation de la langue, Bruxelles se caractérise par un multilinguisme croissant. La question qui se pose est de savoir dans quelle mesure cette situation affecte les structures traditionnelles du modèle d’apaisement, qui vise à réguler les contacts entre les deux langues traditionnelles.

Rudi Janssens est chercheur senior à la VUB et membre de Brio.